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II- LE DECOR DU MANUSCRIT

L'enlumineur

Au Moyen Age, les manuscrits enluminés sont largement minoritaires , mais mieux conservés car ils sont plus précieux. L'enluminure, ou miniature a plusieurs fonctions. Elle permet la décoration du livre , mais à aussi un rôle pédagogique. Elle permet d'imager un texte, et de s'y repérer.

L'enlumineur reçoit une feuille de parchemin déjà écrite . Son espace d'expression a été préalablement délimité par le scribe. Il existe plusieurs styles d'enlumineurs qui ont chacun une fonction précise. L'enlumineur de lettre (parfois la même personne que le scribe) se contente des majuscules. L'enlumineur de bordures est chargé de la décoration des marges. Enfin, l'historieur ou peintre d'histoires  compose comme son nom l'indique, des scènes historiées. Il intervient en dernier et réalise ses compositions sur des demi pages ou même des pages entières.

Les lettres de plus grande taille sont ornées de végétaux, d'animaux, et aussi de personnages. Certaines lettres montrent de véritables scènes. A la fin du Moyen Age, les bordures se développent à un tel point qu'on y insère des animaux réels ou fantastiques, des armoiries ou des scènes en médaillon.

Si le livre a été pendant longtemps l'un des seuls supports de l'expression artistique, le peintre ne fait pas ce qu'il veut. Sa créativité obéit à des règles précises dictées par le commanditaire. Son métier est codifié. A l'époque romane, on ne fait d'ailleurs pas de distinction entre l'artiste et l'artisan. Cela change à la période gothique ou les artistes sont (re)connus et signent leurs compositions.

Le peintre choisit rarement le sujet de son enluminure et la place qu'elle occupe. Il a donc peu d'autonomie . Les seuls espaces de liberté sont les marges.

Les couleurs

L'enlumineur prépare ses couleurs et utilise des matières souvent toxiques: des minéraux, des végétaux, des colles de poisson, ou la gomme arabique comme liant. D'autres éléments tels que l'oeuf, le vin, l'urine entrent dans la composition. Les couleurs sont précieuses. Il n'est pas rare qu'un enlumineur travaille sur plusieurs enluminures à la fois pour utiliser tout le produit .

Pour le rouge , on broyait la cochenille , un insecte qui fournit une très belle couleur. La pourpre est obtenue grâce à un coquillage. Elle était réservée aux empereurs. La garance est une plante méditerranéenne utilisée comme pigment mais aussi comme teinture. Elle fut utilisée jusqu'au XIXe pour teindre les pantalons des soldats de l'armée française. Enfin, le cinabre ou vermillon est un sulfate de mercure. Dès le Moyen Age on sait le synthétiser en chauffant du souffre dans du mercure.

Le jaune est fabriqué à partir d'ocres et d'orpiment , une roche contenant de l'arsenic (très toxique) qui donne la couleur de l'or. On utilisait aussi le safran et la sève de chélidoine .

Le bleu est la couleur préférée au Moyen Age (voir le livre de M. Pastoureau sur le Bleu). Elle est obtenue grâce à une pierre semi précieuse, le lapis-lazuli. Le vert est obtenu grâce à la malachite .

Le blanc est préparé à partir de céruse . C'est un pigment blanc très toxique contenant des sels de plomb. Les femmes s'en enduisaient le visage pour avoir un teint parfaitement blanc, summum de la beauté. Malheureusement, on imagine l'effet sur la santé…

Les feuilles métalliques sont beaucoup utilisées. Les fonds dorés sont hérités de l'art des icônes byzantines. Si l'or saute aux yeux, l'argent et les alliages sont aussi utilisés. Le batteur d'or empile les plaques métalliques entre les feuilles, et les frappes à l'aide d'un marteau sur une enclume. Au bout de plusieurs jours de travail, il obtient des feuilles très fines (de l'ordre de quelques microns) qui peuvent alors êtres collées sur une enluminure. Elles sont ensuite polies avec une agate ou une dent de sanglier.

L'enluminure romane

Le style de l'enluminure évolue de la période romane à la période gothique. A la période romane, la production se fait dans les monastères . Les personnages sont encore très stylisés . Ils s'adaptent aux formes , conformément à la loi de l'horreur du vide, très présente dans l'art roman. On peut presque parler de « déformation ». Il n'y a pas de réalisme  : les images doivent avoir une valeur démonstrative et pour cela, avoir une bonne lisibilité . Le contour est donc très marqué et le dessin prime sur la peinture. Le plissé des vêtements laisse deviner l'anatomie des personnages. Les visages n'expriment pas les émotions conformément aux règles de l'art byzantin des icônes dont s'inspire au début l'enluminure.

Les lettrines romanes sont aussi reconnaissables à leurs jambages qui emplissent la page et permettent au décor de s'y développer.

L'époque romane privilégie les lettres ornées d'animaux ou de végétaux.

L'enluminure gothique

Le passage du roman au gothique se fait brusquement. A la fin du XIIe siècle, les monastères perdent leur monopole de la copie de manuscrit au profit des ateliers urbains et des écoles . Ces ateliers laïcs spécialisés répondent à une demande toujours plus importante. Ce déplacement de lieux de productions induit un changement dans l'art d'enluminer .

Tout d'abord, les initiales perdent de leur importance et sont plus stéréotypées, isolées sur un fond or, et ornées d'arabesques rouges et bleues. On abandonne la simplicité et la majesté des formes. Les compositions deviennent alors plus complexes, mais aussi plus gracieuses . Les personnages ne sont pas traités de la même façon, on fait ressortir leurs états d'âme. On cherche à faire preuve de plus en plus de réalisme dans la représentation. On commence aussi à représenter la profondeur . Cette approche de la perspective annonce déjà la Renaissance.

Cette fraîcheur propre aux enluminures repose sur les coloris très vifs et une extrême précision . Si à l'époque romane, le dessin tient une place prépondérante, à l'époque gothique, il laisse place à la couleur, aux volumes , et aux jeux d'ombres et de lumière . Les fonds plats disparaissent et laissent place à des perspectives ou des paysages , qui laissent supposer une source de lumière naturelle et non plus divine.

Les sentiments des personnages transparaissent dans la mise en scène de la composition et dans les postures. La souffrance s'exprime par des lignes cassées (positions des mains) tandis que la tendresse laisse place à la fluidité des lignes (têtes penchées). Les thèmes représentés ne sont plus les mêmes. Le culte marial se développant considérablement à l'époque gothique, on montre les sentiments maternels au travers d'une Nativité. La souffrance de la Vierge est exacerbée dans les Crucifixions.

Le copiste

C'est le grand spécialiste de l'écriture. Sa tâche est lente et demande beaucoup de concentration. On estime qu'un écrivain professionnel peut copier au maximum trois feuillets par jour . Pour accélérer la copie, le manuscrit est parfois divisé en cahiers qui sont distribués à différents scribes .

Il s'entraîne sur des tablettes de cire qu'il grave à l'aide d'une pointe de métal , d'os, ou d'ivoire. Pour tracer les lettres sur le parchemin, il utilise une mine de plomb , d'argent ou d'étain pour les brouillons et pour tracer les réglures. Pour écrire, il se sert de plumes d'oiseaux (oie), ou il utilise le calame (roseau taillé). Le scribe taille lui-même sa plume à l'aide d'un canif. La taille détermine alors le style d'écriture. Le bec peut être symétrique ou biseauté à droite ou à gauche pour obtenir des pleins et des déliés. Une erreur est effacée en grattant avec le grattoir ou grâce à la mie de pain .

C'est le copiste qui prépare son encre. L'encre noire est une substance végétale obtenue à partir de noix de galle et de sulfate de plomb. L'encre rouge est réservée aux titres de chapitres pour se repérer plus vite en l'absence de table de matières. Cette coutume a donné son nom aux rubriques, terme dérivé du latin « ruber » qui signifie « rouge ». Les titres sont tracés par le rubricateur quand le copiste a fini son travail.

 

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